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Projet de règlement “SUR” : maintenons une boite à outils diversifiée

Pour garantir l’adoption de la protection intégrée des cultures, le nouveau cadre réglementaire sur l’utilisation durable des pesticides (SUR) en construction doit promouvoir des approches pragmatiques et un large panel de solutions efficaces. Quant aux objectifs de réduction, il est indispensable qu’ils soient proportionnés en fonction des efforts déjà effectués et fondés sur des preuves.

Après sa présentation le 22 juin par la Commission européenne en Conseil des ministres de l’Agriculture, le futur règlement sur l’utilisation durable des pesticides SUR (Substainable use of pesticides) entame son parcours législatif. Le cap de « moins 50 % à horizon 2030 » des produits phytopharmaceutiques fixé dans le Green Deal reste maintenu collectivement malgré l’alerte d’un groupe d’États membres face aux enjeux de sécurité alimentaire.

« Un cadre réglementaire commun émerge au niveau européen. Il met un point final à la surtransposition réglementaire, source de distorsion de concurrence entre États membres, que laissait possible la directive SUD, explique Emmanuelle Pabolleta, directrice générale de Phyteis.

Les négociations au sein des instances européennes devraient durer deux ans, y compris celles avec les États membres afin de fixer pour chacun l’objectif de réduction des produits phytopharmaceutiques.

Trouver les bons curseurs sur les objectifs de réduction des pesticides par État

Pour Phyteis, au-delà du calcul de réduction des pesticides indexé sur des périodes de référence (voir encadré), les actions déjà engagées sont à intégrer pleinement. Par exemple, les ventes de produits phytopharmaceutiques ont déjà baissé de 50 % en 20 ans en France. « Pour chaque État, l’enjeu est de trouver les bons curseurs sur les objectifs de réduction avec une réelle prise en compte des efforts historiques, ajoute-t-elle. Fragiliser la capacité de l’Europe à produire en quantité et en qualité ne serait pas acceptable. » Regrettant que l’étude d’impact sur la souveraineté alimentaire soit prévue par la Commission européenne a postériori.

La Commission vise aussi une sortie du marché des produits les plus risqués en leur affectant des coefficients de pondération élevés. « Sans solutions alternatives efficaces, des filières, notamment en fruits, pourraient disparaitre, alerte la directrice générale de Phyteis. En lien avec le changement climatique, l’agriculture doit aussi se prémunir face à l’émergence d’espèces nuisibles ou d’importantes hausses des populations de bioagresseurs. »

Partager les solutions de réduction des pesticides via une base de données

Autre point clé, le règlement rend obligatoire la protection intégrée, engageant les conseillers comme les utilisateurs. « La protection intégrée est déjà mise en avant par les entreprises de protection des cultures via leur plateforme agronomique de démonstration et les essais conduits avec les organismes techniques par exemple, ajoute Emmanuelle Pabolleta. Elle guide depuis plus de 30 ans nos programmes de recherche. Lesquels s’ouvrent au numérique à la bioprotection et aux biotechnologies. Les partenariats noués avec des équipementiers et des start-up accentuent cette dynamique d’innovation. L’objectif est de s’orienter vers de la haute précision dans le traitement des cultures. »

Pour aller plus loin et plus vite, Phyteis soutient le développement d’une base de données européenne des solutions de protection intégrée, accessible à tous les agriculteurs sur le modèle du Contrat de Solutions développé en France avec l’ensemble des organisations agricoles.

D’ailleurs, c’est bien sur l’innovation que mise la Commission européenne pour compenser la réduction des quantités de pesticides.  En tête de liste : l’agriculture de précision et le développement de nouvelles technologies comme l’édition du génome pour créer plus rapidement des variétés résistantes aux maladies. Les biotechnologies, un des quatre piliers de la protection des cultures, ouvrent un champ considérable de recherche.

Nécessaire soutien financier des agriculteurs

Enfin, pour accompagner cette transition, la Commission s’appuie sur la PAC : Écorégimes dans le 1er  pilier, mesures agroenvironnementales dans le second. Dans ce périmètre budgétaire et pendant cinq ans, les États membre pourront davantage mettre l’accent sur les mesures soutenant les changements de pratiques agricoles pour protéger les cultures. Le financement de cette transition et de la prise de risques économiques par les agriculteurs est essentiel. Pour Phyteis, les pouvoirs publics doivent soutenir et encourager fortement le recours aux solutions numériques, à l’agriculture de précision et à la bioprotection pour travailler avec succès à la réalisation des objectifs de réduction des pesticides.

Comment est calculé le taux de réduction des pesticides ?

Dans les grandes lignes, l’intensité de réduction des pesticides se calculent sur trois années, de 2015 à 2017. Ces résultats sont croisés avec les utilisations confrontées sur deux périodes : 2011-2013 et 2015-2017. Ces deux modes de calculs sont comparés à la référence européenne. Selon le niveau de réduction par rapport à cette valeur moyenne, la quote-part des États sera a minima de 35 % et au maximum de 65 %.

C’est l’indicateur de risque HRI-1 qui mesure les utilisations. La notion d’intensité d’utilisation a été introduite en ramenant cet indicateur à la surface cultivée ayant reçu un traitement phytopharmaceutique.