La pyrale du maïs et la sésamie
La pyrale et la sésamie, ravageurs du maïs, perforent les tiges et les épis. En endommageant les grains, leurs larves favorisent les fusarium, producteurs de toxines nocives pour l’alimentation.

La pyrale du maïs et la sésamie, deux lépidoptères, attaquent le maïs. Leurs chenilles creusent des galeries, d’où leur nom de « foreurs du maïs ».
En raison du changement climatique, la pyrale, se développe sur l’ensemble du territoire. Outre le maïs, elle se nourrit aussi de houblon, de pommes, de melon et de poivron…
La sésamie, originaire du bassin méditerranéen, est une noctuelle. Sensible aux températures négatives, elle vit essentiellement au sud de la Loire.
Toutefois, des foyers émergent ces dernières années en Bretagne et en Basse-Normandie.
- La pyrale du maïs, Ostrinia nubilalis, possède des ailes triangulaires. Celles-ci sont ocre-foncé pour les mâles et beige-clair pour les femelles. Dans les deux cas, elles présentent des zig-zags bruns. Le papillon mesure environ 25 mm de large. Selon leurs cinq stades, les larves de pyrale du maïs font de 2-3 à 20 mm de long. De couleur gris clair, elles présentent sur le dos une ligne gris foncé. Les orifices respiratoires forment des points noirs sur le corps.
- La sésamie, Sesamia nonagrioides, arbore une silhouette trapue avec une touffe dorsale. Son envergure atteint 30 à 40 mm. Ses ailes antérieures sont brunes, celles postérieures sont blanches.
- La chenille effectue sept stades larvaires avant d’atteindre sa taille maximale de 45 mm. À cette phase, elle est glabre, de couleur rose pâle, avec des orifices respiratoires (points noirs) moins visibles que ceux de la pyrale.
Cycle biologique de la pyrale du maïs
Le cycle de la pyrale dépend de la température. Au sud de la France, elle réalise 2 à 3 vols (générations) par an. La deuxième génération d’adulte apparait de mi-juillet à mi-août.
Au nord, il n’y a normalement qu’un seul vol (monovoltin) en juin-juillet. Néanmoins, les cycles avec deux vols (bivoltin) sont de plus en plus fréquents en raison du changement climatique. Dans ce cas, le premier vol se déroule en juin.
Les femelles de pyrale pondent jusqu’à 100 œufs, qu’elles déposent par plaques près de la nervure centrale des feuilles de maïs.
L’incubation des œufs dure de 5 à 15 jours, selon la température. De plus, une bonne hygrométrie accélère leur éclosion. À leur naissance, les larves explorent immédiatement la plante en se nourrissant des feuilles. Ensuite, lorsqu’elles atteignent le troisième stade, elles pénètrent les tiges de maïs à proximité de la panicule mâle. À ce moment-là, la plante se casse souvent au point d’entrée du ravageur.
Les larves poursuivent alors leur développement à l’intérieur des cannes ou dans l’épi, causant d’importantes blessures.
En fin d’été, elles migrent vers la base des tiges, au niveau du collet pour hiberner. Ainsi, elles se situent en dessous de la ligne de coupe des batteuses ou des ensileuses. La chenille de pyrale qui est alors à son dernier stade larvaire entre en diapause. Dans ces conditions, elle résiste jusqu’à – 25°C. À l’inverse, les autres stades ne survivent pas aux températures négatives pendant quelques jours. C’est pourquoi, dans les régions où la deuxième génération n’est pas complète, les chenilles meurent.
La levée de diapause se déroulera au printemps suivant.
© FMC
La femelle de la pyrale pond ses œufs le long de la nervure centrale.
Cycle biologique de la sésamie
La sésamie effectue deux vols (générations). Toutefois, lorsque les conditions climatiques sont particulièrement chaudes, elle réalise même un troisième vol.
La nymphose commence mi-avril. Les adultes apparaissent de mi-mai à fin juin pour se reproduire lors de vols nocturnes. Le deuxième vol débute mi–juillet et dure jusqu’à début septembre.
Une femelle de sésamie dépose des groupes de 60 œufs à l’intérieur de la gaine des jeunes feuilles. L’incubation dure 5 à 8 jours. Les larves pénètrent dans la plante par la base de la tige pour se nourrir. Puis, elles remontent progressivement jusqu’aux épis.
En septembre, comme pour les pyrales, la sésamie au stade chenille entre en diapause et passe l’hiver dans la tige de maïs.
Néanmoins, les larves de sésamie en hibernation meurent si les températures se situent autour de – 7° C à – 8°C pendant 1 semaine.
© FMC
Œufs de sésamie à l’intérieur de la gaine des feuilles.
La nuisibilité de la pyrale du maïs et de la sésamie
La pyrale du maïs et la sésamie sévissent autant dans les maïs grain que dans les maïs fourrage.
Leur nuisibilité est à la fois directe (perte de rendement) et indirecte (contamination par des maladies). Par exemple, en maïs grain, Arvalis estime la baisse de rendement jusqu’à 16 quintaux par hectare.
Concrètement, les larves de ces deux insectes foreurs endommagent les tiges et les épis. Quelle que soit la situation, les galeries qu’elles creusent limitent la circulation de la sève. La plante fragilisée peut même casser. Les larves de sésamie, plus grosses, vont jusqu’à sectionner un pied.
Par ailleurs, la sésamie attaque le maïs plus précocement que la pyrale, dès le stade 4 feuilles.
Mais surtout, les blessures au niveau des épis ouvrent la porte aux spores de fusarium. Ces champignons sécrètent des toxines dangereuses pour la santé humaine et animale. En cas de dépassement des seuils de mycotoxines (1 500 µg/kg pour les toxines DON), les industriels peuvent refuser les lots de grains. De même, un maïs ensilage contaminé perd de sa qualité nutritionnelle.
Stratégie de protection combinatoire contre la pyrale du maïs et la sésamie
La protection contre la pyrale du maïs et la sésamie se déroule pendant tout le cycle de la culture. Dès la récolte, des mesures prophylactiques sont mises en place pour limiter les populations à la parcelle. Puis, au printemps, en fonction de la période de vol de ces lépidoptères ravageurs, des stratégies de protection intègrent le biocontrôle.
En cas de forte pression, la phytopharmacie sécurise le programme de protection. Dans ce cas, le positionnement intervient au plus près du pic de vol pour une efficacité optimum.
Par ailleurs, le rôle des insectes auxiliaires est à prendre en compte dans les itinéraires techniques.
La prophylaxie
Les mesures prophylactiques interviennent dès la récolte du maïs. Le broyage des cannes au ras du sol, ainsi que l’enfouissement des résidus servent à éliminer les larves en diapause. En outre, l’efficacité du broyage augmente si cette pratique concerne toute une zone agricole. Les amas de rafles en bordure des champs représentant des réservoirs potentiels, ils sont donc à enlever.
Dans les situations à risques, les variétés tolérantes vis-à-vis de Fusarium graminearum permettent de réduire le risque de développement de mycotoxines.
Les aménagements paysagers
Les zones enherbées multi-espèces et les haies jouxtant des parcelles de maïs constituent un habitat pour les auxiliaires. la d’un
Des insectes et araignées prédateurs ou des parasitoïdesconsomment des œufs et de jeunes larves de pyrale et de sésamie. Parmi eux, des mouches Asilidae, des syrphes, la mouche des chenilles (mouche tachinaire) et des punaises Anthocoridés (Orius sp.) interviennent activement. De leur côté, les araignées piègent les lépidoptères dans leur toile et celles dépourvues de soies chassent à l’affût.
Couverts végétaux à associerprès des parcelles pour héberger les insectes auxiliaires : apiacées (ombellifères), astéracées (composées), fabacées (légumineuses), graminées, euphorbiacées.
La surveillance par piégeage et observations
Au printemps, l’objectif est de repérer les premiers vols des mâles et des femelles de pyrale et de sésamie. Le réseau d’observations des Bulletins de santé du végétal (BSV) fournit des indications sur l’apparition des adultes. Des pièges à phéromones sexuelles spécifiques et des pièges lumineux permettent de déterminer la période d’activité des papillons.
Cependant, le niveau d’infestation au printemps se mesure souvent à la récolte du maïs en quantifiant les larves en diapause.
- En maïs grain, au-delà de 0,8 larve de pyrale par plante, le seuil de risque pour l’année suivante est atteint.
- Pour les sésamies, faute de seuil d’intervention défini, la lutte chimique doit s’effectuer avant que les larves ne pénètrent dans la tige de maïs.
Les pièges lumineux renseignent sur la dynamique des populations de pyrales et sésamie.
L’agronomie digitale
En relais, le digital optimise le partage d’information. Aussi, l’Outil d’aide à la décision (OAD) Arc™ Farm intelligence suit l’émergence et la dynamique des populations. Les 280 pièges du réseau FMC servent à l’alimenter.
Le biocontrôle
Le biocontrôle avec des micro-organismes
- Bacillus thuringiensis. Cette bactérie contamine les larves de pyrale et de sésamie ainsi que celles d’héliothis lorsqu’elles sont au stade « baladeur ». La toxine produite par ces micro-organismes interfère avec le système digestif de la larve après ingestion. Alors, elle provoque une septicémie. Cet insecticide possède la mention Utilisable en agriculture biologique.
La lutte biologique avec les parasitoïdes oophages
- Lâcher de trichogrammes. La technique date des années 1980. Les femelles de trichogrammes, Trichogramma brassicae, pondent uniquement dans les œufs des pyrales. Par conséquent, elles empêchent leur développement. L’efficacité dépend du moment de l’introduction au champ de ces parasitoïdes, c’est-à-dire au début du vol de la pyrale.
Des capsules ou des plaquettes contiennent les œufs de ces micro-hyménoptères parasitoïdes. Les plaquettes s’accrochent sur des tuteurs où aux feuilles. Après, les parasitoïdes éclosent en 7 vagues successives pour couvrir une génération de pyrales.
On peut positionner manuellement les capsules de trichogrammes dans la parcelle. Des drones peuvent les larguer pour simplifier la pose. Dans ce dernier cas, des pilotes professionnels réalisent cette prestation. Cette méthode de lutte biologique dite « inondative » couvre en moyenne plus de 70 000 hectares de maïs. De surcroît, elle peut s’employer avec d’autres méthodes de biocontrôle ou de la phytopharmacie préservant ces parasitoïdes et les auxiliaires.
Le trichogramme pond dans l’œuf de pyrale.
La phytopharmacie
Lorsque le risque devient important, le recours à un insecticide est parfois nécessaire. Il s’applique sur la première génération (G1) afin de bloquer la dynamique de l’insecte. Ensuite, sur la génération suivante (G2), ces produits protègent l’épi des attaques de larves.
Toutefois, l’application doit avoir lieu avant que les maïs ne deviennent trop hauts, pour éviter la limite de passage du tracteur. Les traitements doivent être réalisés en dehors de l’activité des pollinisateurs, conformément à l’arrêté abeilles.
Familles insecticides
- Pyréthrinoïdes. Les lambda-cyhalothrine, perméthrine, deltaméthrine et cyperméthrine, insecticides neurotoxiques, possèdent un mode d’action larvicide. Néanmoins, des populations de pyrales résistantes aux pyréthrinoïdes existent dans le centre de la France.
Ces insecticides s’appliquent au moment du pic de vol ou en encadrant le pic de vol avec deux applications. - Diamides. La chlorantraniliprole est un insecticide myobloquant. En effet, il cumule un mode d’action ovicide, ovo-larvide et larvicide. Le produit se positionne à 30 % du vol des pyrales ou sésamies, c’est-à-dire au tout début des pontes. De plus, cette substance active est sélective des auxiliaires des cultures dont les trichogrammes.
- Le spinosad est une substance issue de la fermentation de bactéries du sol produisant les spinosines A et Ad. Ces toxines agissent sur le système nerveux des larves de pyrales et de sésamies. Par ailleurs, cet insecticide est Utilisable en agriculture biologique.
Importance de l’approche combinatoire pour protéger les cultures des pyrales
Dans la mesure du possible, la lutte contre la pyrale du maïs et la sésamie doit s’effectuer collectivement pour être davantage efficace. En ce sens, l’objectif est d’abaisser le plus possible le foyer de ces insectes dans chaque parcelle tout en préservant la biodiversité. L’approche combinatoire apporte des solutions complémentaires qui s’adaptent au niveau de risque local et aux contraintes d’organisation. Enfin, l’usage de drones pour lâcher les trichogrammes facilite le déploiement de la lutte invasive sur une même zone.
Protection combinatoire contre les insectes foreurs du maïs en 2030
Des méthodes insectifuges sont en cours d’étude. D’une part, des kairomones attirent ou repoussent les pyrales du maïs. D’autre part, le recours aux phéromones perturbe l’accouplement des papillons.
Quoi qu’il en soit, les solutions de biocontrôle et les insecticides en association restent essentiels pour contrôler les fortes pressions.