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Mycotoxines DON et fusarium, vigilance accrue en 2024

Dangereuses pour la santé, les mycotoxines DON, T-2 et HT-2 sont produites au champ par des champignons du genre Fusarium. Ils contaminent les grains des céréales. Aussi, à compter de la récolte 2024, l’Europe renforce ses exigences sanitaires sur les teneurs de ces toxines dans les céréales brutes et transformées.

Le décret d’application vient d’être publié au Journal officiel de l’UE.

La présence de mycotoxines dans les céréales brutes comme transformées est une question de santé publique. Par exemple, le déoxynivalénol (DON) augmente le risque d’apparition de maladies inflammatoires chroniques de l’intestin chez l’Homme et l’animal. Cette toxine exacerbe même les symptômes. Les trichotécènes A (T-2 et HT-2), moins fréquemment présents mais davantage dangereux, peuvent affecter l’intégrité des cellules.

Ces mycotoxines se développent surtout au champ. En effet, elles sont produites par les champignons du genre Fusarium. Le pathogène s’installe sur les fleurs des céréales et les grains lors des pluies. Fusarium graminearum est seul du groupe responsable de l’apparition des mycotoxines DON. Les trichotécènes A sont liées à F. langsethiae (Europe du Nord) et F. sporotrichoïdes (Europe du Sud). L’avoine se révèle la culture la plus exposée à ces fusarium, devant l’orge de printemps, le maïs et le blé dur. Le blé tendre et l’orge d’hiver le seraient beaucoup moins.

Seuils en mycotoxines DON dans les céréales abaissés

Aussi, face à ces risques sanitaires, la Commission européenne durcit sa réglementation en vigueur depuis 2016. Cette décision fait suite à un avis scientifique adopté par l’Agence européenne de la sécurité des aliments (EFSA) en 2017 afin de mieux protéger la population. Par conséquent, dans son Règlement (UE) 2024/1038 du 9 avril 2024, l’autorité européenne prend de nouvelles dispositions. Ce texte modifie le règlement (UE) 2023/915 préfigurant ces évolutions. Il abaisse les seuils réglementaires en mycotoxines DON dans les lots de céréales que les organismes stockeurs vendent aux transformateurs. Par exemple, le nouveau règlement diminue le seuil de mycotoxines DON en blé tendre et orge de 1250 à 1000 µg/kg. Pour le maïs et le blé dur, la limite maximale passe de 1750 à 1500 µg/kg. De nouvelles valeurs concernent aussi les produits transformés.

De plus, la Commission rend obligatoire le respect des seuils pour les toxines T-2 et HT-2. Depuis 2013, elles faisaient uniquement l’objet de recommandations. Particularité, les seuils pour l’avoine brute s’appliquent désormais pour les grains avec leurs balles, même si elles ne sont pas consommées. En effet, ces céréales sont commercialisées avec leurs enveloppes (glumes et glumelles).

Toutes ces évolutions s’appliquent dès le 1er juillet 2024.

Certiphyto

Les variétés de blé tolérantes à la fusariose peuvent diminuer par deux les contaminations. C’est un des leviers efficaces pour éviter de dépasser le seuil en mycotoxines DON, notamment en non labour.

Vigilance collective pour éviter les fusarium

Les valeurs des mycotoxines DON, T-2 et HT-2 s’appliquent aux lots que les organismes stockeurs vendent aux transformateurs. Les contrôles s’effectuent à la livraison. Un dépassement de ces seuils conduit à un déclassement de la marchandise. De plus, la dilution intentionnelle d’un lot de grains contaminés est interdite. Aussi, la qualité sanitaire des grains repose sur une gestion collective pratiquée au champ. « Avec le durcissement des seuils, une combinaison de leviers agronomiques permet de réduire le risque de leurs dépassements », rappelle Julien Durand-Réville, responsable santé chez Phyteis.

Avec le labour, l’enfouissement des pailles de céréales et des cannes de maïs non récoltées réduit par exemple la quantité d’inoculum. Sans cela, le fusarium se conserve en surface sur les résidus pour contaminer les céréales suivantes. En complément, la diversification de la rotation et davantage de variétés de céréales tolérantes limitent le risque. « La fusariose est une maladie très dépendante de conditions pluvieuses au moment de la floraison des céréales, précise Ronan Vigouroux, responsable protection combinatoire des cultures chez Phyteis. Utilisée en dernier recours, la phytopharmacie contribue à sécuriser la qualité sanitaire des grains. »

Par ailleurs, Fusarium graminearum peut contaminer les épis de maïs en rentrant par les blessures causées par les pyrales et sésamies. « Là encore une combinaison de solutions existe contre ces insectes foreurs, telle que le Bacillus thuringiensis et les trichogrammes parasitoïdes, ajoute Ronan Vigouroux. Ces méthodes s’associent avec les insecticides respectant les insectes auxiliaires, selon le niveau de pression du ravageur. »

Évolutions réglementaires pour les mycotoxines DON, T-2 et HT-2
Grains non transformés Seuil DON 2024 µg/kg Seuil DON 2023 µg/kg Le seuil T-2 et HT-2 2024 µg/kg
Blé tendre 1000 1250 50
Blé dur 1500 1750 50
Maïs 1500 1750 100
Orge 1000 1250 150 et 200 (malterie)
Avoine (avec ses balles) 1750   1250