Produits phytopharmaceutiques : quels usages et quelles conditions d’emploi ?
Les produits phytopharmaceutiques, essentiels pour tous les modèles agricoles, constituent le filet de sécurité des cultures. Comment les définir et quelles sont les exigences réglementaires pour leur utilisation ?
Champignons, virus, adventices, insectes, limaces… En France, environ 7 000 bioagresseurs dont 2500 d’origine animale*, 4 000 pathogènes et plus de 500 plantes adventices infestent les cultures. Les régulations naturelles qui émergent au sein des écosystèmes ne suffisent pas toujours à les contrôler. De même, le choix des variétés ainsi que les techniques et pratiques culturales, bien qu’efficaces pour limiter précocement les populations, ne garantissent pas systématiquement leur maintien en dessous des seuils de risque.
Par conséquent, en agriculture lorsque les bioagresseurs menacent le rendement et la qualité des récoltes, la phytopharmacie entre en jeu. Elle constitue l’un des quatre piliers de l’approche combinatoire de la protection des cultures.
« Une plante malade ou que les insectes attaquent doit être protégée, rappelle Philippe Michel directeur des affaires juridiques et réglementaires chez Phyteis. Pour cette raison, toutes les formes d’agriculture utilisent des produits phytopharmaceutiques. Une protection efficace garantit la sécurité alimentaire. Dès lors, l’utilisation de ces produits s’effectue dans un cadre réglementaire très stricte. D’abord, leur commercialisation n’est possible que s’ils détiennent une autorisation de mise sur le marché (AMM). L’Anses la délivre pour un ou plusieurs usages après l’examen du dossier. Un usage correspond à la combinaison bioagresseur-culture et au mode d’application. Ensuite, les produits s’appliquent dans le respect de bonnes pratiques notamment celles fixées dans les décisions d’autorisation. »
Définition réglementaire d’un produit phytopharmaceutique
Un produit phytopharmaceutique contient une ou plusieurs substances actives et des co-formulants dont les fonctions sont diverses comme par exemple pour assurer son application optimale ou sa stabilité.
Toutefois, le rôle de ces produits dépasse la seule lutte contre les bioagresseurs. Selon l’article 2 du règlement européen CE 1107/2009 , un produit phytopharmaceutique permet notamment et selon les cas :
- De protéger les végétaux ou les produits végétaux contre les organismes nuisibles.
- D’exercer une action sur les processus vitaux des végétaux (autre que les substances nutritives).
- De conserver des produits végétaux.
- Et aussi, de freiner, prévenir la croissance ou détruire les végétaux ou les parties de végétaux indésirables.
Catégories de produits phytopharmaceutiques
Les produits phytopharmaceutiques qu’on appelle aussi sur le terrain « produits phytosanitaires » font partie de la famille des pesticides. D’ailleurs, les pesticides incluent aussi les produits biocides. Il s’agit des désinfectants des locaux, ceux de traitement du bois, de lutte contre les rongeurs, des produits pour l’hygiène humaine (lutte contre les poux par exemple) ou vétérinaire (lutte contre les tiques par exemple), etc…
Au total, l’Europe approuve 423 substances actives phytopharmaceutiques, parmi lesquelles 296 sont disponibles en France (données 2024, EU Pesticides Database). Cela représente 2848 spécialités commerciales destinées à un usage professionnel et autorisées sur le territoire français.
On distingue alors deux grandes catégories de produits phytopharmaceutiques selon leur composition :
- Les produits issus de la chimie de synthèse.
- Et les produits d’origine naturelle. Ils comprennent des extraits végétaux, animaux, minéraux et les micro-organismes (comme les champignons, bactéries, et virus). Toutefois, en France, ces produits portent la mention « biocontrôle » (soit 513 spécialités). Les produits d’origine naturelle peuvent aussi posséder la mention utilisable en agriculture biologique (UAB) (soit 407 spécialités).
Les produits phytopharmaceutiques, qu’ils soient conventionnels ou de biocontrôle/UAB, se classent également en fonction de leurs cibles :
- Végétaux : herbicides (1225), défanants, anti-mousses et régulateurs de croissance.
- Pathogènes et ravageurs : fongicides (1235), insecticides (307), acaricides (85), molluscicides (limaces grises et noires) (49), nématicides (contre les nématodes) (10), etc.
(source ephy)
Obligations réglementaires pour appliquer un produit phytopharmaceutique
Les données réglementaires figurent sur l’étiquette du produit. Également, on les retrouve dans les bases de données comme Phytodata ou Ephy. Ces données concernent notamment la dose, le stade de la culture ou de la cible, le mode et les conditions d’application.
Les conditions d’utilisation précisent des informations telles que :
- Les Équipements de protection individuel (EPI) ;
- Le délai avant récolte et celui de rentrée dans les parcelles ;
- Les distances de sécurité pour les riverains ainsi que les zones de non traitement par rapport aux ressources en eau, les ZNT « arthropodes » et les « ZNT plantes non-cibles » ;
- Aussi, les mesures à respecter pour la protection des abeilles et autres pollinisateurs.
Enfin, selon le stade végétatif de la culture et le bioagresseur, on pulvérise un produit phytopharmaceutique pour protéger les feuilles, les fleurs, les fruits ou les graines et tubercules. Certains produits agissent en traitement de semences, principalement contre des insectes ou des champignons.
*sources :
- Insecticides, insectifuges, André Fougeroux de l’Académie d’Agriculture, édition Presses des Mines.
- Hyppa – Inrae – Hyppa : encyclopédie en protection des plantes – Les adventices des cultures – HYPPA
- AFPP – 10e Conférence internationale sur les ravageurs en agriculture et insectes invasifs de Montpellier. M. Martinez, JJ.F. Germain & J.C. Streito (octobre 2014).