Abeilles et arboriculture, une étude confirme le partenariat gagnant-gagnant
Pollinisation, santé des abeilles, pratiques agricoles et apicoles sont liées, avec à la clé des bénéfices additionnels en termes de production agricole et de miel. La preuve dans le cadre d’une expérimentation menée sur un verger de pommiers de Basse Durance.
Le terrain a parlé, bien loin des idées reçues circulant sur les oppositions entre agriculture et apiculture. Pendant trois ans, une expérimentation technique et scientifique, conduite par le GRCETA de Basse Durance, le Réseau Biodiversité pour les Abeilles et BASF France division Agro, a permis de mesurer les interactions entre l’apiculture et l’arboriculture de Provence. Réalisée sur le Domaine de Confoux localisé à Lamanon (13) et ses 180 ha de pommiers, l’étude a suivi l’activité de six colonies d’abeilles fournies par Christel Vitrant, apicultrice professionnelle (800 ruches).
Les résultats ont été présentés aux élus de la région le 7 avril à Lamanon. « Nous avons besoin de ce type d’expérimentation pour faire de la pédagogie, non seulement auprès des apiculteurs et des arboriculteurs, mais aussi des riverains et des élus », complète Pascal Borioli, directeur du GRCETA de Basse Durance. La pollinisation est indispensable pour nombre de productions agricoles, dont les vergers. Pour Christel Vitrant, « c’est par le dialogue et une approche terrain que l’on peut travailler main dans la main avec les arboriculteurs. »
Trois objectifs définissent le cadre de l’étude :
- Montrer comment peuvent coexister apiculture et agriculture sur un territoire, de façon productive et concertée
- Observer les pratiques et les performances agricoles et apicoles autour d’un rucher
- Travailler ensemble sur des pratiques respectueuses ou favorisant les pollinisateurs : apiculteurs, agriculteurs et monde agricole, laboratoires, associations…
Les pollinisateurs sauvages sont comptés sur trois variétés de pommes (Pink Lady, Jazz et Gala) aux différents stades de floraison avec en complément la surveillance de nichoirs à osmies. À partir de prélèvements d’échantillons de pollen, des analyses palynologiques et de résidus de produits phytosanitaires ont été effectuées.
Production de miel supérieure à la moyenne
À Lamanon, les vergers sont entourés de garrigue, de bois, de maraîchage, de vignes, de prairies et de quelques parcelles de grandes cultures avec notamment du colza et du tournesol.
- Premier constat: les abeilles visitent en particulier des ligneux dont les fruitiers (75 à 86 %), quelques autres cultures et environ 15% d’herbacées sauvages. « Pour maintenir leur défense immunitaire et résister aux différentes menaces, notamment pathologiques, une colonie d’abeilles a besoin 20 à 30 kg de pollen avec une diversité d’origine, au moins cinq familles, complète Sandrine Leblond, responsable biodiversité chez BASF France division Agro.
- Les niveaux de production de miel se sont révélés largement supérieurs à la moyenne nationale dès la première année (37 kg, soit plus de 8 kg de plus que la moyenne) et identiques les années suivantes (16 kg puis 26 kg). Même constat pour les osmies présentes en permanence dans le verger : au cours de ces trois années d’étude, le taux d’occupation des nichoirs augmente de manière régulière.
Bonnes pratiques apicoles et agricoles fondées sur la concertation
Le lien entre santé des colonies et méthodes de protection phytosanitaire du verger est l’un des points clés de l’expérimentation. Les molécules utilisées sur les pommiers ont été recherchées dans différentes matrices apicoles : la cire, le couvain, le pollen et le pain d’abeilles. 73 % de ces molécules, notamment les insecticides et fongicides, n’ont pas été quantifiées. Celles qui ont pu l’être, présentent une faible toxicité. La seule molécule à toxicité modérée identifiée est appliquée à la fois en agriculture et en apiculture pour assurer le traitement sanitaire des colonies. Les bonnes pratiques agricoles, mises en place et conformes à la législation antérieure à « l’arrêté Insectes pollinisateurs » de novembre 2021, passent aussi par l’absence d’application d’insecticide lors de la floraison, l’observation de la présence de pollinisateurs avant les traitements et des échanges réguliers entre arboriculteur et apiculteurs.
« Les résultats de l’étude sont très encourageants, conclut Sandrine Leblond. En adoptant certaines pratiques agricoles, il est possible d’obtenir des bénéfices mutuels alliant pollinisation de qualité et amélioration du bol alimentaire des abeilles. »