Rouille jaune
La rouille jaune peut réduire une récolte de moitié en cas de forte attaque ! La tolérance variétale et la phytopharmacie restent les moyens les plus efficaces pour limiter son impact.

La rouille jaune ou rouille striée, Puccinia striiformis, apparait pendant la montaison des blés. Fréquemment diagnostiquée en Bretagne et en Normandie sur blé tendre, cette espèce est présente depuis 2011 sur l’ensemble des surfaces cultivées. Dans une moindre mesure, elle se développe sur le blé dur et le triticale.
Les symptômes: des pustules jaunes parfois orangées et alignées entre les nervures forment des stries sur la surface de la feuille.
Distinguer la rouille brune et la rouille jaune
- La rouille brune se propage uniformément dans le champ de blé. Des taches brunes puis des pustules recouvrent la surface des feuilles.
- La rouille jaune est repérable au champ en sortie d’hiver sous forme de petits foyers. Puis, elle s’étend progressivement depuis l’intérieur de la parcelle. Les taches et les pustules se situent le long des nervures.
Le cycle biologique de la rouille jaune
Le cycle de reproduction de Puccinia striiformis comprend une phase sexuée à l’automne (non observée) et une phase asexuée au printemps.
À la fin de l’hiver, l’épidémie débute depuis les feuilles basses des blés infectés. Ainsi, les pustules libèrent les urédospores issues de la reproduction asexuée. D’un côté, le vent assure le transport des spores au sein de la parcelle et sur de longues distances. De l’autre, la contamination se déroule de proche en proche par contact des feuilles.
Pour se développer, ce champignon préfère un printemps frais et humide. Les températures idéales sont entre 7°C et 15 °C. De plus, le temps doit être couvert car la rouille jaune est sensible aux UV. Quant aux pluies, elles doivent être régulières pour favoriser la germination des spores. Après une infection, des symptômes de chlorose se manifestent en 6 à 8 jours. Si les conditions sont toujours favorables, des pustules apparaissent et emettent de nouvelles spores en 12 à 14 jours,
Cependant, lorsque le climat devient plus sec avec des températures dépassant 25°C, ces cycles asexués s’arrêtent.
En fin de saison, le champignon hiverne sous forme de mycélium dans les feuilles de la plante hôte. Il survit donc sur les résidus de culture.
Le cycle sexué nécessite d’avoir simultanément en été un hôte alternatif, l’épine-vinette (Berberis) et l’hôte primaire, c’est-à-dire la céréale ou la graminée sauvage. Néanmoins, ce cas de figure ne se rencontre pas en Europe.
La nuisibilité de la rouille jaune
La rouille jaune contamine principalement les feuilles. Cependant, des pustules peuvent aussi atteindre les barbes et les glumes des épis en cas de forte attaque.
La rouille jaune peut être très nuisible. En effet, ses attaques entrainent des pertes de rendement allant jusqu’à 70 %, comme en 2014.
La stratégie de protection combinatoire contre la rouille jaune
La protection contre la rouille jaune repose principalement sur les variétés peu sensibles et la phytopharmacie.
Les pratiques culturales
La conduite du blé influence le risque d’apparition de la rouille jaune. Pour réduire ce risque, les pratiques culturales offrent des solutions préventives.
Le choix des variétés
La résistance variétale à la rouille jaune constitue le premier levier de lutte contre cette maladie. D’ailleurs, la majorité des variétés de blé tendre, de blé dur et de triticale présentent une résistance à la rouille brune et à la rouille jaune.
Les mécanismes de résistance s’activent généralement après le stade montaison (30 BBCH). De fait, si des symptômes apparaissent avant ce stade, la maladie cesse ensuite de progresser d’elle-même avec la croissance de la culture.
Le contrôle du volume foliaire
La rouille jaune, comme la plupart des maladies des céréales, prospère avec l’humidité. Par conséquent, il est essentiel de ne pas augmenter excessivement la densité des semis ni l’apport d’azote.
La destruction des résidus
Les repousses de céréales et les résidus de paille servent de refuge au pathogène pendant l’été. Ainsi, leur élimination réduit la pression de la maladie pour la saison suivante.
L’agronomie digitale
Des outils d’aide à la décision tels que Prévi-LIS d’Arvalis modélisent le développement de la rouille.
Cropwise Protector pilote aussi la protection des cultures de blés et orges contre toutes les maladies. Il est interopérable avec les principaux outils de gestion parcellaire et les stations météo connectées du marché.
Xarvio FIELD MANAGER, également interopérable, simule le risque des maladies des céréales en intégrant les prévisions météo et les données agronomiques de la parcelle.
La phytopharmacie
La surveillance commence tôt en sortie d’hiver, dès le stade épis 1 cm. Les attaques précoces, souvent repérées trop tard, causent les pertes de rendement les plus importantes. En parallèle, les bulletins de santé du végétal (BSV) informent sur le développement de la maladie.
Le seuil d’intervention indicatif :
- À partir du stade épi 1 cm si plusieurs plantes groupées présentent des pustules.
- Au stade 1 nœud de la céréale dès l’observation des premières de pustules.
Pour les variétés très sensibles à moyennement sensibles à la rouille jaune (note du Geves ≤ 6), un traitement dès le stade épi 1 cm (BBCH 31) peut être nécessaire en cas de forte infection. Puis, un autre traitement peut prendre le relai jusqu’à la sortie de la dernière feuille.
En revanche, pour les variétés tolérantes, le premier traitement intervient à partir au stade 1 nœud (32 BBCH).
Gestion de la résistance
La note technique commune Arvalis, Inrae et Anses présente tous les ans un bilan de l’évolution des résistances des souches de pathogènes aux principales maladies. Ainsi, elle recommande l’alternance des familles chimiques pour pérenniser l’efficacité des produits.
Malgré tout, contre les rouilles, elle préconise d’éviter les SDHI lorsque leur contribution n’est pas décisive (présence de septoriose par exemple). Depuis 2022, les experts d’Arvalis et de l’Inrae observent une évolution de la résistance aux SDHI chez les différentes espèces de rouille.
Programmes fongicides
Les fongicides contre les rouilles appartiennent majoritairement à la famille des triazoles et des strobilurines. Ils contiennent une association de substances actives pour prévenir les résistances. Certains ont une efficacité combinée sur rouilles et septoriose.
L’élaboration d’un programme de protection fongicide se raisonne au niveau de l’ensemble des maladies :
- D’une part, intervenir selon les recommandations des outils d’aide à la décision et en prenant en compte la sensibilité variétale aux différentes maladies.
- D’autre part, alterner les modes d’action avec une seule application par programme pour chaque SDHI, strobilurine, triazole, fenpicoxamide. En complément, éviter de répéter les mêmes triazoles.
Impact de la protection combinatoire contre la rouille jaune
En année de faible à moyenne pression, les variétés tolérantes évitent un traitement fongicide. En outre, les outils d’aide à la décision décèlent tout au long du cycle les besoins en protection des céréales. Ainsi, ils permettent d’ajuster les programmes fongicides à la pression maladie et lorsque c’est possible de baisser l’indicateur de fréquence de traitement.
La protection combinatoire contre la rouille jaune en 2030
Génétique
Les variétés résistantes constituent le principal levier préventif. Tout l’enjeu est de cumuler un haut niveau de résistance à plusieurs maladies : rouilles, septorioses et fusariose pour le blé par exemple.
Agronomie digitale
Le suivi de la pression rouille jaune s’effectue avec des outils d’aide à la décision de plus en plus précis. En parallèle, l’offre numérique sert de base à de nouveaux modèles économiques. Ils se fondent sur un objectif de santé de la culture.
Phytopharmacie
De nouvelles familles chimiques permettront de renforcer l’efficacité des programmes chimiques.