Les mosaïques de l’orge
Les mosaïques de l’orge sont des virus transmis par un micro-organisme du sol. Tout comme le virus de la jaunisse nanisante de l’orge, elles sont responsables de pertes significatives de rendement.
Les mosaïques de l’orge sont désormais présentes dans de nombreuses régions céréalières, notamment sur les orges d’hiver.
Les mosaïques de l’orge sont provoquées par deux virus différents : la mosaïque jaune de l’orge (BaYMV) et la mosaïque modérée de l’orge (BaMMV).
Apparu dans les années 1980, le BaMMV est de nos jours peu présent, l’ensemble des variétés d’orge sur le marché lui étant résistantes. À l’inverse, la mosaïque jaune de l’orge est particulièrement répandue, notamment son pathotype BaYMV Y2.
Ces virus sont transmis par un champignon microscopique du sol, Polymyxa graminis, qui agit comme vecteur. Par la suite, les symptômes de mosaïques apparaissent généralement de janvier à mars. Leur intensité dépend de la sensibilité variétale ainsi que des conditions climatiques.
Pour y faire face, la mise en œuvre d’une combinaison de mesures agronomiques et de gestion du sol est indispensable.
Le développement des mosaïques de l’orge
Le cycle de développement des mosaïques est étroitement lié à celui de Polymyxa graminis, l’organisme vecteur.
Phase de survie dans le sol
Polymyxa graminis subsiste sous forme de forme de sporosores très résistants. Ceux-ci peuvent rester viables des dizaines d’années dans certains sols.
Par ailleurs, son développement est favorisé par un enchaînement climatique précis :
- Un automne doux lui permettant, de coloniser le système racinaire et de s’y multiplier.
- Un hiver alternant période de douceur et de froid.
Infection des racines
Lorsque les conditions sont humides, le champignon colonise le système racinaire via ses zoospores. La transmission ne peut se faire que si la souche virale est déjà présente dans la parcelle.
Multiplication virale dans la plante
Une fois dans la plante, les virus se multiplient et se propagent de cellule en cellule. L’intensité des symptômes dépend de la résistance variétale, de l’agressivité de la souche virale et des conditions environnementales.
Contamination secondaire
Les spores contenant les virus sont relarguées dans le sol à la décomposition des racines infectées. Elles s’accumulent au fil des cultures successives d’orge, augmentant la pression virale.
Les symptômes des mosaïques de l’orge
Les symptômes se manifestent principalement au stade mi-tallage et au début de la montaison.
A partir de la mi-tallage, sur les feuilles, on observe l’apparition de motifs caractéristiques : marbrures plus claires du limbe (« tirets chlorotiques »), taches allant du vert au jaune, visibles de loin. Ces symptômes sont souvent visibles dès la fin de l’hiver, en l’absence de gel prolongé.
Les vieilles feuilles, présentent également un jaunissement de leur pointe puis se dessèchent. La croissance des plantes est ralentie, et le développement des talles peut être limité.
Au début de la montaison, et dans les cas les plus sévères, un nanisme de la culture peut aussi être observé. De même, on peut constater un système racinaire réduit.
En cas de doute sur les symptômes, seule l’analyse virologique confirmera le diagnostic.
Symptômes de mosaïques sur feuilles de céréales
La nuisibilité des mosaïques de l’orge
Les mosaïques sont l’un des principaux facteurs de perte de rendement sur orge d’hiver. En moyenne, l’impact observé sur le rendement est de 12 q/ha essentiellement lié à une réduction du nombre de talles fertiles.
De plus, la qualité technologique de l’orge (calibrage, taux de protéines) peut aussi être fortement dégradée.
Les attaques précoces affectent durablement le développement de la culture. Les variétés sensibles dans les parcelles infestées affichent un fort recul en comparaison avec les variétés tolérantes.
Enfin, la nuisance est d’autant plus marquée en cas de rotation courte ou de conditions de sol favorables au développement de Polymyxa graminis (sols humides, compacts, mal drainés). »**
Stratégie de protection combinatoire contre les mosaïques de l’orge
La lutte contre les mosaïques de l’orge repose essentiellement sur des leviers agronomiques et le choix variétal. En revanche, il n’existe pas à ce jour de traitement curatif efficace après l’infection.
Choisir une variété résistante
Le principal levier repose sur l’utilisation de variétés résistantes. En particulier, le gène de résistance rym4 est efficace contre le BaMMV et le BaYMV-1. Cependant, la nouvelle souche BaYMV-2 parvient à le contourner. En revanche, le gène rym5 semble apporter une protection additionnelle contre BaYMV-2.
Le catalogue officiel indique, pour chaque variété, le niveau de tolérance aux mosaïques. Il est indispensable d’en tenir compte dans les zones à risque.
Réduire les risques agronomiques
L’assolement est un levier important. En pratique, il est conseillé d’éviter les rotations courtes, afin de limiter la pression virale dans le sol.
De plus, un bon état structural du sol, un drainage efficace et l’évitement des semis précoces permettent de limiter le développement du champignon vecteur.
Par ailleurs, il est recommandé de nettoyer les outils de travail du sol après avoir travaillé une parcelle contaminée. Et ce afin d’éviter de transmettre le virus à d’autres parcelles.
Surveiller les symptômes et cartographier les parcelles à risque
Il est important de repérer les zones atteintes en fin d’hiver pour établir une cartographie de la pression virale à l’échelle de l’exploitation.
Une attention particulière doit être portée aux parcelles en creux ou en zones hydromorphes, plus favorables à Polymyxa graminis. A cet effet, les outils numériques peuvent aider à tracer l’évolution de la maladie d’une année sur l’autre.
Horizon 2030 pour les mosaïques de l’orge
Les perspectives de lutte contre la mosaïque de l’orge s’appuient sur la sélection variétale et la compréhension fine des interactions virus-plante-vecteur.
Les programmes de recherche européens visent à identifier de nouveaux gènes de résistance plus durables, notamment face aux souches contournantes du BaYMV.
Le projet CASDAR CAP PHENOGEN (2020‑2023), a notamment permis d’introduire le marquage génétique des gènes de résistance dès la première année des études VATE. Ces recherches viennent en complément du phénotypage sur le terrain.
En parallèle, les efforts portent sur la caractérisation moléculaire des populations virales. Ces données permettent d’anticiper l’émergence de nouvelles souches et d’adapter les stratégies de sélection.
Enfin, l’étude de la biologie de Polymyxa graminis est un axe clé. Des recherches sont menées pour comprendre ses mécanismes de transmission et les conditions favorables à sa dissémination.