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Le puceron cendré du pommier  

Le puceron cendré du pommier prolifère rapidement, abîmant feuilles et fruits. La lutte intégrée combine les auxiliaires, les méthodes physiques et les biosolutions. La phytopharmacie, restreinte, ne s’emploie qu’en dernier recours.

Parmi les pucerons ravageurs des vergers de pommiers et de poiriers, Dysaphis plantaginea, ou puceron cendré du pommier, est non seulement le plus fréquent mais aussi le plus nuisible. En effet, il envahit rapidement les pommiers, pique les jeunes feuilles et rameaux, extrait la sève, provoquant leur déformation. Plus tard, il peut également s’attaquer aux fruits, ce qui entraîne une dépréciation de la récolte.

Description

  • Les adultes aptères sont vert foncé à brun violacé. Leur corps est recouvert d’une poudre blanchâtre qui a l’aspect de la cendre.
  • Les adultes ailés sont noirs et possèdent une tache brillante sur l’abdomen ainsi que de longs cornicules marron foncé. Les ailes mesurent pratiquement le double de la longueur du corps.
  • Les œufs sont noirs et brillants.
  • Les larves, d’abord beige, deviennent rose puis gris-brun.

 Adultes aptères et larves de pucerons cendrés.

Cycle biologique du puceron cendré du pommier

Ensuite, les œufs éclosent au printemps en même temps que le gonflement des bourgeons.

Ainsi, cette première génération de pucerons donne naissance à des “fondatrices”. Elles ont alors la particularité de passer d’un mode de reproduction sexué à asexué. Ce mode de reproduction par parthénogénèse assure au puceron un pouvoir de colonisation rapide de son hôte.

En effet, une femelle vivipare peut engendrer environ 70 larves. De 2 à 3 générations se succèdent au printemps, soit jusqu’à 6 à 8 générations par an et jusqu’en octobre.

Lorsque la surpopulation intervient, les formes ailées apparaissent pour migrer vers un autre hôte . Cependant, cette migration cesse en juin. Dès lors, les colonies se déploient vers leur hôte secondaire, le plantain, pour voir apparaître les formes sexuées. Puis, ces dernières reviennent sur le pommier pour s’accoupler et pondre. Les femelles déposent les œufs sous les écorces et à la base des bourgeons de la plante hôte.

Cycle biologique commun à toutes les espèces de pucerons

La nuisibilité du puceron cendré du pommier

Les pucerons sont des insectes « piqueur-suceurs », ils se nourrissent de la sève élaborée grâce à leur stylet qui perfore les tissus des végétaux. Cette succion provoque l’enroulement des feuilles et leur déformation.

Au sein d’un arbre, les attaques du puceron cendré se propagent rapidement par foyers sur les extrémités des pousses. Par conséquent, la croissance de ces organes ralentit. De surcroît, les pucerons s’attaquent aux fruits, lesquels prennent un aspect bosselé. Ils ne peuvent plus être valorisés dans le circuit du frais.

Dégâts des trois autres pucerons ravageurs du pommier

Le puceron vert du pommier, Aphis pomi. Il est tout aussi fréquent que le puceron cendré mais les dégâts sont un peu moins graves dans un premier temps. Au départ, il affaiblit juste les jeunes pousses. En revanche, plus tardivement, il va enrouler les feuilles et déposer du miellat sur feuilles et fruits. Puis, un champignon noir, la fumagine, recouvre cette sécrétion, rendant le fruit non commercialisable.

Le puceron lanigère, Eriosoma lanigerum. Cette espèce est surtout présente sur les pommiers, parfois sur poiriers et cognassiers. En ne ciblant que les parties ligneuses, elle perturbe la croissance de l’arbre.

Le puceron mauve du poirier, Dysaphis pyri. Il s’attaque aux pousses. Comme pour le puceron vert, les colonies produisent beaucoup de miellat. La fumagine qui s’y dépose provoque également le déclassement des fruits.

La stratégie de protection combinatoire contre le puceron cendré du pommier

La lutte contre les pucerons est complexe du fait de leurs invasions massives et d’un nombre d’insecticides autorisés très limité. Néanmoins, des prédateurs naturels ou élevés, dont l’emblématique coccinelle, aident à réguler les populations au verger. D’autres méthodes, telle que la lutte physique, se développent dans le cadre d’une stratégie de protection combinatoire.

Les pratiques culturales

Des mesures prophylactiques freinent l’installation des pucerons.

Choix variétal

Au moment de l’installation du verger, le choix peut se porter sur des variétés moins sensibles aux attaques de pucerons comme Goldrush® ou Juliet®. De manière générale, les pucerons ont plus de difficulté à piquer les variétés vigoureuses et à déformer les feuilles.

Hôtes secondaires

Il est important de limiter les hôtes secondaires des pucerons dans les espaces enherbés du verger et ses abords. C’est pourquoi le plantain (puceron cendré) et le gaillet (puceron mauve du poirier) sont à éliminer en priorité.

Lutte physique

L’application d’une couche d’argile blanche sur les feuilles doit coïncider avec la migration de la femelle du puceron cendré vers le pommier pour se reproduire. Perturbés, les pucerons ne reconnaissent pas les feuilles comme une source de nourriture. Ainsi, cette barrière réduit l’alimentation et la ponte des œufs dans le verger.

Une substance de base composée de polymères naturels et utilisable en agriculture biologique forme une toile sur la surface des feuilles. Dès lors, cette solution emprisonne les larves, qui ne peuvent plus bouger ni se nourrir, et meurent rapidement.

La prédation naturelle 

Les bandes fleuries hébergent un cortège d’auxiliaires. Ils assurent tout au long de l’année une régulation des ravageurs des pommiers et poiriers. Par exemple, le puceron cendré a comme prédateur naturel la chrysope verte, la coccinelle à deux points, la cécidomyie du puceron et le forficule. L’installation d’hôtels à insectes dans les vergers complète le dispositif.
De plus, des piégeages dans les vergers et aux abords permettent d’évaluer les espèces présentes ainsi que le niveau des populations auxiliaires.

Les biosolutions

Lâcher de macro-organismes

Cette technique de lutte biologique est généralement mise en œuvre sur de faibles niveaux de population de bioagresseurs. Elle permet également de réintroduire la faune auxiliaire au verger.

Substances minérales et végétales

Les huiles minérales et végétales appliquées à la fin de l’hiver asphyxient les œufs. Appliqués tôt au printemps, des extraits d’orties ou des tisanes agissent en préventif contre les pucerons et acariens.

Quant aux pyréthrines naturelles, produits de biocontrôle et utilisables en AB, elles ont un large spectre d’action sur les insectes.

La phytopharmacie

La surveillance est nécessaire dès le début du printemps pour enclencher la protection insecticide en cas de dépassement du seuil de risque. Pour le puceron cendré, le seuil de risque est très bas en raison de sa nuisibilité selon les guides OILB (Organisation internationale de lutte biologique).

  • Puceron cendré, Dysaphis plantaginea: 3 bouquets infestés sur 1000 (avant floraison)

Les insecticides autorisés

Ils appartiennent aux familles des :

  • Pyréthrinoïdes de synthèse (pré-floraison)
  •  Pyridine-carboxamide (flonicamide
Impact de la protection combinatoire contre le puceron cendré

Aucune méthode de lutte n’est pleinement efficace à elle seule.
Bien que non nouvelle, l’idée de repousser ou de perturber les insectes est prometteuse. Une telle stratégie contribue à limiter l’usage des derniers insecticides autorisés, ils ne s’appliquent qu’en dernier recours.

La protection combinatoire contre le puceron cendré du pommier en 2030

Prophylaxie

En raison du peu d’options de protection au printemps, les expérimentations en lutte biologique se concentrent sur le retour des pucerons cendrés dans les arbres à l’automne. Ainsi, les mesures appliquées incluent la défoliation des arbres en septembre et l’application de barrières physiques, comme l’argile.

Le douchage des arbres permet de lessiver les pucerons. Néanmoins, cette technique reste difficile à mettre en œuvre.

Lutte biologique

Le réensemencement des vergers avec les auxiliaires permet de réguler les populations de pucerons. Cependant, cela nécessite la création de zones refuges et d’éviter les traitements insecticides non respectueux des auxiliaires.

Biosolutions

L’écologie chimique consiste à interférer dans l’échange sémiochimique (phéromones, allomones et kairomones) entre insectes ainsi qu’entre insectes et plantes. En la matière, elle est certainement l’une des solutions les plus prometteuses.

Phytopharmacie

Si le nombre de produits insecticides diminue considérablement, un minimum de substances actives autorisées reste indispensable. Par ailleurs, la technique « attract and kill » évite de pulvériser les produits. En effet, elle consiste à attirer les insectes dans un piège contenant un insecticide. Utilisée contre les mouches du fruit, elles pourraient concerner d’autres insectes.