Le datura stramoine
Le datura (Datura stramonium) est l’une des adventices les plus problématiques des cultures de printemps et d’été.
Très toxique, il représente un risque sanitaire majeur pour les productions végétales et animales, en plus de concurrencer fortement les cultures.
Sa gestion nécessite une stratégie combinatoire rigoureuse, mobilisant des leviers agronomiques, mécaniques et chimiques.
Le datura (Datura stramonium) est une plante adventice estivale appartenant à la famille des Solanacées. Très compétitive et toxique, elle infeste de nombreuses cultures de printemps et d’été, notamment le maïs, le tournesol ou le soja.
En France, cette espèce se développe surtout dans les zones chaudes, avec une présence marquée dans le sud et l’ouest du territoire.
Le cycle biologique du datura
Bien que le genre Datura compte plusieurs espèces dans le monde, il n’existe pas d’espèce liée au Datura cultivée en France.
- Germination : les graines commencent à germer dès que les températures dépassent 10 à 15 °C, en général à partir de la mi-avril. La levée peut se prolonger jusqu’en septembre, ce qui induit une levée échelonnée difficile à maîtriser.
- Croissance : une fois levé, le datura connaît une croissance extrêmement vigoureuse, pouvant atteindre 1,5 à 2 mètres de haut en quelques semaines. La plante est facilement reconnaissable à ses grandes feuilles ovales, très dentées, et à ses tiges robustes et ramifiées.
- Reconnaissance : stade plantule (cotylédons très étroits et allongés et 2-3 premières feuilles ovales avec des bords entiers, limbes dentés à partir de la 4e feuille, poils sur la tige et les pétioles), stade adulte (peut mesurer de 40 cm à 4 m de hauteur grâce au développement d’une tige puissante et ramifiée, ses grandes feuilles présentent des dents inégales et ses fleurs sont longues, blanches et en forme d’entonnoir).
- Floraison et fructification : la floraison intervient dès le début de l’été. Les fleurs, blanches à violet pâle, sont tubulaires et s’ouvrent en général en fin de journée. Chaque fleur donne naissance à un fruit ovoïde et épineux : une capsule à 4 valves, contenant plusieurs centaines de graines.
© IStock
Fleur de Datura Stramoine
- Graines : noires, plates, en forme de rein, les graines sont très résistantes :
- Une plante produit entre 500 et 700 graines par capsule, soit jusqu’à 30 000 graines par individu.
- Les graines présentent une dormance élevée et peuvent rester viables 30 à 40 ans dans le sol, constituant un stock semencier très durable.
- Pollinisation : essentiellement autogame, mais la pollinisation croisée est possible via les insectes (entomophile).
- Cycle de vie : le cycle complet (de la germination à la production de graines) se fait en 4 à 5 mois. En automne, la plante meurt naturellement avec le froid, mais les graines persistent dans le sol, prêtes à germer lors des saisons suivantes.
© IStock
Graines noires
La nuisibilité du datura
Le datura est une adventice particulièrement nuisible, tant par sa vigueur que par sa toxicité. Il entre rapidement en concurrence avec les cultures pour la lumière, l’eau et les nutriments, provoquant des pertes de rendement.
L’ensemble de la plante contient des alcaloïdes tropaniques (atropine, scopolamine, hyoscyamine) très toxiques pour les humains et les animaux. La présence de fragments dans les récoltes peut entraîner le déclassement de lots entiers (cas de la farine de sarrasin ou de conserves de légumes).
Les fourrages contaminés (maïs ensilage, foin) présentent également un risque d’intoxication pour le bétail.
La plante est à l’origine de nombreux retraits de produits du marché en raison de sa toxicité.
Les situations à risque
Le datura est en forte progression sur le territoire français, en particulier dans le Sud-Ouest, la façade atlantique, le Bassin parisien, le pourtour méditerranéen et les vallées du Rhône et de la Loire.
Il est surtout présent dans les cultures de printemps et d’été (maïs, soja, tournesol), mais peut également coloniser les prairies jeunes, les intercultures ou les chaumes après céréales. Les zones à végétation clairsemée (chaintres, bords de champs, passages de roues ou d’enrouleurs) sont des foyers fréquents.
Le risque est maximal lorsque les pratiques culturales favorisent les levées (sols nus, engrais localisé, binages répétés).
Le nettoyage insuffisant du matériel agricole contribue aussi à la dissémination des graines.
Stratégie de protection combinatoire contre le datura
La lutte contre le datura repose sur une approche combinatoire, intégrant des leviers prophylactiques, mécaniques numériques et chimiques :
Prophylaxie
Allongement des rotations (alternance cultures d’hiver/printemps/été), faux-semis en interculture, végétalisation dense des zones à risque, nettoyage rigoureux des matériels et des chantiers.
Lutte mécanique
Désherbage mécanique en plusieurs passages (4 à 5), sans travail profond du sol (houe rotative, herse étrille, bineuse adaptée). L’arrachage manuel reste utile avant la montée en graine, mais coûteux et contraignant.
Lutte chimique
Sur maïs, les stratégies efficaces combinent herbicides de prélevée à large spectre et traitements de post levée positionnés sur jeunes stades (2-4 feuilles). Des matières actives comme les sulfonylurées, tricétones ou produits de contact (bentazone, pyridate) sont recommandées. Une intervention tardive ciblée (« en dirigé ») peut s’avérer nécessaire.
Approches innovantes
Des outils de télédétection (drones, imagerie satellite) permettent d’identifier précisément les foyers de datura avant récolte, facilitant leur gestion et le tri des parcelles.
Prospectives horizon 2030
Des recherches portent sur des pathogènes spécifiques du Datura.
Des caméras embarquées dotées d’intelligence artificielle permettent de localiser précisément les pieds de Datura stramoine et de diriger un outil ou un jet de pulvérisateur précisément sur la plante à détruire dans la culture.