Prévention des risques phyto : l’adoption des EPI innovants s’accélère
« Continuons à proposer des EPI de plus en plus supportables, mais aussi très protecteurs. L’un ne va pas sans l’autre ! » Échanges avec Fabien Vermot-Desroches d’Axe-Environnement, sur les voies de progrès face à la prévention du risque phyto.
Depuis 2012, Axe-Environnement accompagne les agriculteurs sur la prévention des risques et la protection de l’environnement. Aussi membre du Contrat de Solutions, l’entreprise propose des formations et crée des équipements de protection collectifs.
Pour Fabien Vermot-Desroches, son directeur du développement, les agriculteurs prennent de plus en plus conscience du rôle protecteur des Équipements de protection individuelle (EPI). Les innovations qui procurent plus de confort ainsi qu’une communication efficace vers les agriculteurs contribuent à leur déploiement. D’autant qu’en France, le port d’EPI pour traiter les cultures avec un produit phytopharmaceutique ou de biocontrôle est obligatoire.
Comment évolue la prévention des risques phytopharmaceutiques ?
Avec le renouvellement des générations, la protection des applicateurs devient un sujet majeur. En parallèle, plusieurs initiatives contribuent à une meilleure prise en compte des EPI. D’abord, la formation Certiphyto, obligatoire depuis 2008, aborde systématiquement ce point. De plus, elle est loin d’être la seule sur le terrain.
Ensuite, une autre démarche, se révèle extrêmement positive : nous parlons d’une seule voix sur la prévention des risques phyto. Concrètement, cela signifie que tous les acteurs, dont la MSA, les interprofessions, les syndicats agricoles, les fabricants d’EPI et de produits phyto, utilisent un langage commun de prévention. Cette uniformisation constitue la base du travail que nous menons dans le cadre du Contrat de Solutions avec les partenaires.
Mieux informés, les agriculteurs utilisent donc davantage les EPI ?
Effectivement, un langage commun doublé d’une communication plus efficace, cela marque les esprits. On note des progrès d’année en année, mais la transition ne s’opère pas en un claquement de doigts. Nous œuvrons dans une démarche d’amélioration en continue.
En ce sens, les nouveaux EPI vestimentaires sont innovants. Pour chaque tâche, matériel de pulvérisation ou situation correspond un jeu d’EPI précis. Nous commercialisons cette gamme d’EPI ergonomiques depuis 2018. Leur adoption s’accélère. Pour rien au monde un agriculteur qui adopte ces nouveaux équipements ne reviendra aux solutions de protection chimique anciennes.
C’est-à-dire que les EPI doivent être adaptés à chaque situation pour être acceptés ?
Oui, ce point est essentiel. Gardons cette dynamique en concevant des EPI supportables et acceptables selon les taches à effectuer. Surtout, n’oublions pas que les agriculteurs travaillent dehors avec la chaleur. Ils portent des charges et évoluent dans des environnements que j’appelle agressifs. En revanche, dans un laboratoire ou une usine, l’environnement est plus constant, il ne requiert qu’une seule catégorie d’équipement.
De fait, si on veut protéger les agriculteurs uniquement avec des EPI provenant du secteur de la chimie, je pense que cela ne fonctionnera pas bien. Par contre, pour certaines tâches plus exposantes, alors ces équipements plus lourds sont clairement indispensables. Exemple, si l’agriculteur entre en contact avec le nuage de pulvérisation lors d’un traitement sur un tracteur sans cabine.
D’ailleurs, je trouve dommage que les autorités ne reconnaissent pas la norme ISO18889 pour les gants partiels de rentrée. Ils correspondent bien plus à cette situation et sont protecteurs. Concrètement, si on doit travailler dans la parcelle (relevage en vigne…) avec des gants chimiques classiques, les gens ne les porteront pas. Avec ce type de travaux, impossible de les supporter pendant 8 heures vu les niveaux de transpiration !
La preuve de la protection n’est-elle pas le premier critère quand on propose un nouvel EPI ?
Quand on propose un équipement de protection individuelle, il faut être certain qu’il protège correctement, selon les jeux de normes en vigueur. C’est un prérequis. De plus, nous commençons à avoir des retours à travers différentes études. Ainsi, on se rend compte que porter des gants en rentrée protège à plus de 90 %. Ce niveau correspond au seuil requis et apporte un certain confort. D’ailleurs, l’étude de Phyteis sur les niveaux de protection des différents EPI est vraiment très intéressante. En effet, elle confirme un haut niveau de protection avec les gants chimiques et les combinaisons. Maintenant, on ne doit pas oublier que les équipements de protection individuelle forment le dernier rempart face au risque phytopharmaceutique.
Justement, quelles sont les solutions pour améliorer la prévention primaire ?
La réponse se trouve du côté de l’hygiène, des méthodes de travail et du matériel. Déjà, les cabines des tracteurs et des pulvérisateurs automoteurs devraient être systématiquement de classe 4, donc filtrées et pressurisées. Certes, dans certains cas, ces matériels ne sont pas adaptés au terrain. Par exemple, lors des travaux en serre ou sur les parcelles en devers. Donc, il faut trouver d’autres solutions. Ensuite, lors du remplissage du pulvérisateur, on évite les projections de produit liquide avec des systèmes de transfert fermé. C’est le cas avec le système easyconnect et son connecteur par exemple.
Avec cet équipement collectif, les agriculteurs travaillent à hauteur d’homme. L’opération devient plus facile et l’incorporation de la bouillie s’effectue directement dans le pulvérisateur.
Ne faut-il pas aussi reconsidérer l’image de l’agriculteur qui traite ses cultures ?
Complètement ! D’ailleurs, je finis toujours mes formations par cette comparaison. Cela choquerait tout le monde de voir un chirurgien aller au bloc opératoire sans gants, sans masque, sans blouse et sans charlotte. De même, cela heurterait de voir un pompier aller au feu en jean et tee-shirt ! En revanche, le fait qu’un agriculteur se protège pour appliquer les produits phytos, le premier réflexe de nos concitoyens est de se dire, « il pollue ». Non, il ne pollue pas, il soigne ses cultures. Collectivement, nous devons vraiment expliquer aux gens que les agriculteurs n’utilisent pas des produits phyto par plaisir. Surtout, insistons sur leur professionnalisme. Ils utilisent les produits à leur juste dose, si nécessaire, avec du matériel professionnel, qu’ils entretiennent régulièrement, pour se protéger.