Mildiou, phytopharmacie essentielle face à une attaque sans précédent
La diminution du nombre de substances fongicides et la restriction d’emploi du cuivre compliquent la protection du vignoble face à une contamination « explosive » du mildiou.
Désappointés, désarçonnés : c’est l’état d’esprit qui prédomine chez les viticulteurs du Bordelais face à l’épidémie de mildiou, d’une ampleur inédite. Les vignes conduites en bio comme en conventionnel sont toutes frappées par la maladie en raison des pluies abondantes en juin, soit 100 mm contre 70 mm en moyenne, d’une hygrométrie supérieure à 70 % et des températures de 2° plus élevées qu’habituellement. Aux conditions météo favorables s’ajoute un réservoir de vignes abandonnées et suspectées malades. Les contaminations de black-rot sont même revenues en force dans les parcelles possédant un historique avec cette maladie qui grille aussi les feuilles et les baies. Les mesures préventives, pilier de la protection, n’ont pas suffi. Même si les vignobles du Bordelais sont les plus durement frappés, ceux des trois autres départements de la région Nouvelle-Aquitaine (Dordogne, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques) et deux de la région Occitanie (Gers, Lot) ne sont pas épargnés. Dans le frontonnais (Haute-Garonne), toutes les parcelles révèlent une attaque de mildiou.
Cadences de traitement resserrées pour protéger la vigne
Tout l’enjeu est de maintenir une cadence des traitements préventifs, sans faille, dès les prévisions de risques de contaminations. Néanmoins la pression était bien trop forte cette année. De plus, les programmes fongicides conventionnels doivent alterner les modes d’action phytopharmaceutiques afin d’éviter les résistances.
En viticulture biologique, l’exercice s’est révélé très compliqué car le contrôle de la maladie en cas de forte pression s’appuie principalement sur le cuivre, or l’utilisation de ce produit de bioprotection reste limitée à 4 kg/ha/an en moyenne sur sept ans.
« Nous sommes vraiment dans une situation complexe avec une diminution du nombre de solutions phytopharmaceutiques efficaces pour les viticulteurs, souligne Ronan Vigouroux, responsable environnement Phyteis. De plus, pour les vignes en bio, la protection repose sur une molécule candidate à la substitution, limitée dans son utilisation et pour laquelle il n’existe pas d’alternatives aussi efficaces. La perte du cuivre serait grave pour les producteurs. N’oublions pas non plus les problèmes de main d’œuvre et de pénibilité au travail pour réaliser l’effeuillage, mesure prophylactique qui aide à limiter les contaminations. »
Recherche d’alternatives via la génétique
La résistance variétale se révèle une réponse efficace avec cinq variétés autorisées en France depuis 2018. Ces cépages disposent de résistances polygéniques au mildiou et à l’oïdium ainsi qu’une moindre sensibilité au black rot. Créer des variétés aux qualités gustatives correspondant à la typicité de chaque AOC et renouveler en conséquence un vignoble demandent du temps.
L’agronomie digitale pour modéliser le mildiou
Les modèles numériques de prédiction de l’évolution de la maladie, calés sur les données météo et l’historique de la parcelle, aident à mieux positionner les produits. Dans le cadre du projet Visa (Sporée aérienne du vignoble), l’IFV travaille depuis 2019 sur des capteurs installés au milieu des vigne afin de mesurer le niveau de sporulation dans l’air.