Mildiou, phytopharmacie essentielle face à une attaque sans précédent
La diminution du nombre de substances actives fongicides et la restriction d’emploi du cuivre compliquent la protection face à une contamination « explosive » du mildiou de la vigne en 2023.
Désappointés, désarçonnés : c’est l’état d’esprit qui prédomine chez les viticulteurs du Bordelais. L’épidémie de mildiou de la vigne en 2023 est d’une ampleur inédite. Les vignes conduites en bio comme en conventionnel avec des fongicides sont toutes frappées par la maladie. En cause : des pluies abondantes et récurrentes en juin. La pluviométrie atteint 100 mm contre 70 mm en moyenne. Conséquence, l’hygrométrie est supérieure à 70 %. Quant aux températures, elle enregistrent 2° de plus qu’habituellement. Aux conditions météo favorables s’ajoute un réservoir de vignes abandonnées et suspectées malades. De même, les contaminations de black-rot reviennent en force dans les parcelles possédant un historique avec cette maladie. Celle-ci grille les feuilles et les baies.
Fongicides contre le mildiou de la vigne, applications anticipées
Alors, les mesures préventives, pilier de la protection, n’ont pas suffi. Même si les vignobles du Bordelais sont les plus durement frappés, ceux des trois autres départements de la région Nouvelle-Aquitaine (Dordogne, Lot-et-Garonne, Pyrénées-Atlantiques) et deux de la région Occitanie (Gers, Lot) ne sont pas épargnés. Par exemple, dans le frontonnais (Haute-Garonne), toutes les parcelles révèlent une attaque de mildiou.
Tout l’enjeu est de maintenir des traitements préventifs phytosanitaires, sans faille, dès les prévisions de risques de contaminations. Néanmoins, la pression se révèle bien trop forte cette année. De plus, les programmes fongicides conventionnels doivent alterner les modes d’action phytopharmaceutiques afin d’éviter les résistances.
Le cuivre est essentiel en vignes bio
En viticulture biologique, l’exercice se révèle très compliqué. En cas de forte pression mildiou, la stratégie de protection fongicide s’appuie principalement sur le cuivre. Or, l’utilisation de ce produit de bioprotection reste limitée à 4 kg/ha/an en moyenne sur sept ans.
« Nous sommes vraiment dans une situation complexe avec une diminution du nombre de produits phytopharmaceutiques efficaces pour les viticulteurs, souligne Ronan Vigouroux, responsable environnement Phyteis. De plus, pour les vignes en bio, la protection fongicide repose sur une molécule candidate à la substitution. Elle est limitée dans son utilisation et il n’existe pas d’alternatives aussi efficaces. La perte du cuivre serait grave pour les producteurs. N’oublions pas non plus les problèmes de main d’œuvre et de pénibilité au travail pour réaliser l’effeuillage. En effet, cette mesure prophylactique aide à limiter les contaminations par les pathogènes. »
Recherche d’alternatives via la génétique
La résistance variétale se révèle une réponse efficace avec cinq variétés autorisées en France depuis 2018. En effet, ces cépages disposent de résistances polygéniques au mildiou et à l’oïdium ainsi qu’une moindre sensibilité au black rot. Créer des variétés aux qualités gustatives correspondant à la typicité de chaque AOC et renouveler en conséquence un vignoble demandent du temps.
L’agronomie digitale pour modéliser le mildiou de vigne
Les modèles numériques de prédiction de l’évolution du mildiou de la vigne se calent sur les données météo et l’historique de la parcelle. Ainsi, ils aident à mieux positionner les produits. Dans le cadre du projet Visa (Sporée aérienne du vignoble), l’IFV travaille depuis 2019 sur des capteurs installés au milieu des vignes afin de mesurer le niveau de sporulation dans l’air.