Modes d’action phyto : unisite ou multisite, préventif ou curatif ?

Comment maximiser l’efficacité des traitements tout en limitant les résistances des bioagresseurs ? Comprendre les modes d’action des produits phytopharmaceutiques est essentiel pour concevoir des programmes adaptés et durables. Décryptage.
Le mode d’action biochimique caractérise avant tout un produit phytopharmaceutique.
Ainsi, ces produits sont classés par famille chimique, chacune ciblant un ou plusieurs mécanismes des cellules de bioagresseur. Ils se répartissent aussi en deux grandes catégories : unisites et multisites.
Par ailleurs, ces produits possèdent une action préventive ou curative qui détermine leur positionnement dans le cycle de la culture.
Mode d’action phytopharmaceutique unisite
Les produits unisites ciblent une fonction précise dans les cellules des bioagresseurs. Par exemple, ils bloquent la respiration cellulaire d’un champignon ou perturbent la synthèse des protéines chez les insectes.
Cependant, un usage trop répété favorise l’émergence de résistances. Cela entraîne des mutations des cibles et la dégradation métabolique de la substance active. Afin de limiter ce risque, l’alternance des modes d’action à l’échelle de la culture et de la rotation est indispensable.
Un système de codes alphanumériques identifie les familles de modes d’action des produits phytopharmaceutiques. Ce système s’applique au niveau international pour chaque famille principale :
- Fongicides : Codes FRAC
- Insecticides : Codes IRAC
- Herbicides : Codes HRAC
Mode d’action phytopharmaceutique multisite
Les produits phytopharmaceutiques multisites agissent sur plusieurs fonctions biologiques ou sites biomoléculaires du bioagresseur. Leur polyvalence réduit fortement le risque d’apparition de résistances. En plus de leur efficacité, ces produits s’intègrent dans les programmes, en combinaison avec des produits unisites. Ainsi, ils permettent de pérenniser l’efficacité de ces derniers. Ce sont essentiellement les fongicides qui présentent cette particularité.
Exemples
- En situation de résistance des fongicides contre la septoriose, les agriculteurs utilisent des produits multisites : folpel, phosphonate de potassium, soufre.
- Contre les aleurodes, cochenilles, pucerons et thrips, l’azadirachtine, utilisable en agriculture biologique, agit sur la mue des insectes, l’alimentation et la reproduction.
Produits phytopharmaceutiques préventifs
Les fongicides et insecticides préventifs sont à appliquer avant l’apparition des bioagresseurs ou au début des infestations. Ils gênent le bioagresseur. Par exemple, ils bloquent la germination des spores de champignons ou empêchent la levée et la croissance des adventives. Leur positionnement s’effectue principalement en début de cycle, lors des premières phases de croissance des cultures et d’apparition des bioagresseurs. De plus, en contenant tôt la pression des organismes nuisibles, ils contribuent à l’efficacité des produits complémentaires, si besoin.
La plupart des produits de biocontrôle ont un mode d’action préventif.
Exemples
- Le sclérotinia du colza est un champignon qui se développent sur les pétales, provoquant l’échaudage. Il faut donc empêcher son installation. Les fongicides phytopharmaceutiques autorisés, tous unisites, ne sont efficaces qu’en positionnement préventif, au stade G1 (chute des premiers pétales).
- Les phéromones interfèrent dans la reconnaissance des femelles de papillons par le mâle, empêchant la reproduction. Ces médiateurs chimiques sont spécifiques à chaque espèce.
Produits phytopharmaceutiques curatifs
Les modes d’actions phytopharmaceutiques curatifs sont peu nombreux parmi les fongicides et insecticides. Ils s’avèrent efficaces lorsque les populations de bioagresseurs menacent de dépasser les seuils de nuisibilité pour la culture. Leur rôle est de stopper ou de ralentir les dégâts. Néanmoins, ils doivent être utilisés en dernier recours et dans le cadre d’une stratégie de protection combinatoire.
Exemples
- Contre la tavelure, tout doit être mis en œuvre pour éviter les cycles de contaminations secondaires. Cependant, la lutte en “stop” peut être nécessaire après une pluie contaminatrice avec des produits curatifs. L’existence de solutions curatives ne dispense pas d’une approche préventive.
- Quant aux insecticides, ils ont un rôle curatif contre les œufs, les larves et les adultes selon les cas.
- Enfin, des herbicides curatifs détruisent les adventices déjà levées par contact avec les feuilles.