Engagés pour nos cultures – la filière endive

La filière française de l’endive fait de la France le premier pays producteur du monde. Fierté et emblème des Hauts-de-France, la filière traverse cependant une période de défis économiques et techniques qui engagent sa survie.

Une filière endive fragilisée par les surcoûts de l’énergie et par la baisse de la consommation
D’abord, la production d’endive se caractérise par ses besoins en énergie. La graine est semée au printemps puis la racine récoltée de septembre à décembre. Ensuite, cette racine est conservée dans des cellules réfrigérées, placée dans des bacs où elle pousse pendant 3 semaines à une température entre 16 et 21 degrés.
Par conséquent, le processus énergivore expose la filière aux variations des prix de l’énergie. Aussi, depuis 2022, l’augmentation de 30 % des coûts de l’énergie a considérablement fragilisé la filière.
Par ailleurs, à la hausse des coûts de l’énergie s’ajoutent celles des intrants, des emballages et de la main d’œuvre. Ainsi, selon l’association des producteurs d’endives de France, 300 exploitations se trouvent fragilisées, jusqu’au dépôt de bilan pour certaines. Plus de 4 000 emplois sont menacés.
Ensuite, la filière de l’endive affronte également des difficultés de main d’œuvre, à la fois de recrutement, de fidélisation et d’absentéisme.
Enfin, dernier défi d’ampleur, la consommation d’endive décline. Le taux de pénétration s’est abaissé de 70 à 65% entre la moyenne 2020-2022 et janvier 2023 (nombre de foyers acheteurs d’endives une fois dans l’année).
Des retraits de substances qui créent des impasses techniques
En 2025, plusieurs substances actives clefs utilisées par la filière pour protéger ses cultures seront retirées du marché, au risque d’une concurrence déloyale avec des endives importées :
- Le retrait de la benfluraline (1). Voté en décembre 2022 au niveau européen, il supprime l’une des deux principales molécules du programme de désherbage de la culture d’endive. Utilisée avant les semis, cette substance permettait de lutter contre les chénopodes et contre nombre d’adventices ;
- Le retrait du triflusulfuron (2), un herbicide efficace principalement contre les dicotylédones annuelles ;
- Le retrait du spirotétramate (3). Fixé au 31 octobre 2025, ce retrait prive les producteurs d’un insecticide efficace sur les premiers stades de développement des insectes piqueurs-suceurs, notamment contre le puceron lanigère qui colonise les racines de l’endive.
Une crise désormais existentielle
Face à la suppression de ces solutions phytopharmaceutiques essentielles à la culture de l’endive, la filière s’interroge sur sa capacité de production en l’absence de solutions alternatives concrètes.
En effet, immatures et trop coûteuses, les méthodes alternatives au désherbage chimique ne sont pas encore opérationnelles (désherbage thermique, mécanique, robotisation, pulvérisation localisée).
Par exemple, contre le puceron lanigère, la lutte biologique par l’implantation de bandes fleuries permet l’installation et le maintien d’une population de prédateurs naturels. Toutefois, la présence du prédateur n’est parfois pas synchronisée avec celle du ravageur.
Or, si les coûts de production continuent d’augmenter, la nécessaire répercussion sur les prix du consommateur pourrait achever une filière en souffrance. Ces coûts sont de plusieurs ordres.
D’une part, les investissements pour les bineuses équipées de caméras atteignent des montants supérieurs à 100 000 € mais seront contre la densité des adventices. D’autre part, le temps nécessaire au désherbage manuel est estimé par la filière à 400 heures/ha, sans savoir si la main d’œuvre disponible sera suffisante et si cette technique sera efficace.
« La France est leader mondial dans la production d’endives. Ce produit d’excellence nécessite une maîtrise technique inestimable. En l’état actuel de nos connaissances et de nos moyens, nous sommes dans l’incapacité de pouvoir garantir une production d’endives françaises en 2025 avec la disparition de nos solutions de protection des racines au champ ! »
« Ce risque résulte d’une politique générale d’interdictions sans solutions, conduisant à une baisse du potentiel de production et à un renchérissement des coûts de production et donc des prix de vente en magasins. Ce qui conduit à une baisse de consommation de nos endives et rend l’objectif de souveraineté alimentaire impossible à atteindre ! »
« Nous avons perdu le charbon, ne perdons pas le chicon ! »
Pierre varlet, directeur général de l’association des producteurs d’endives de France
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