Faciliter l’accès aux gènes brevetés des variétés : la mission de l’ACLP
L’ACLP (Agricultural Crop Licensing Platform) réunit des entreprises semencières de toutes tailles pour simplifier l’accès aux gènes brevetés des variétés commerciales. Le point sur son fonctionnement avec Hélène Guillot, sa directrice.
En France, la loi prévoit une exception de sélection pour les brevets sur les gènes de variétés. Cependant, les règles d’accès diffèrent selon les pays européens. « Avec l’ACLP, nous disposons d’un cadre commun et transparent pour les sélectionneurs », explique Hélène Guillot, juriste et directrice de l’ACLP depuis 2023.
« Cette structure agit bien comme un espace d’échange entre détenteurs et utilisateurs de brevets, poursuit-elle. D’un côté, nous offrons à chaque détenteur de gène breveté de variétés, la visibilité et la sécurité d’une plateforme collective. De l’autre, cette organisation lève une contrainte pour les petites et moyennes entreprises de sélection qui peinent à utiliser une variété contenant un gène breveté. » En effet, les membres de l’ACLP incluent des entreprises détentrices ou non de brevets.
Une procédure unique d’échange de brevets pour 41 pays
Concrètement, l’ACLP permet donc d’invoquer l’exception de sélection dans 41 pays, dont ceux membres de l’Office européen des brevets ainsi que l’Ukraine et la Russie. Une simple notification au détenteur du brevet suffit. Ainsi, les sélectionneurs peuvent utiliser les variétés existantes pour créer de nouvelles obtentions.
De surcroît, lorsque le gène breveté reste dans la nouvelle variété, les obtenteurs doivent obtenir une licence pour la commercialiser. Les licences se signent directement entre membres et conservent leur validité même en cas de départ de la plateforme. L’adhésion minimale dure cinq ans et la cotisation reste proportionnelle à la taille de l’entreprise. « Nous couvrons uniquement les frais administratifs, sans but lucratif », précise Hélène Guillot.
Nombre de PME ne peuvent pas gérer seules les négociations de licences. « L’ACLP simplifie les échanges avec un accord standard déjà approuvé par ses membres », détaille Hélène Guillot. Ainsi, les discussions portent uniquement sur le montant de la redevance.
De plus, en cas de blocage au-delà de six mois, un arbitrage indépendant tranche le différend. Trois experts évaluent alors la proposition la plus proche de la valeur de marché du trait. « Chaque membre dispose d’un accès garanti à la licence et dans des délais raisonnables », ajoute-t-elle.
Un cadre économique équilibré
L’organisation n’adopte pas de position sur les outils de propriété intellectuelle. « Nous offrons un cadre économique équilibré dans une filière où brevet et COV coexistent », rappelle Hélène Guillot.
D’ailleurs, les brevets accessibles via la plateforme figurent sur Pinto, la base publique de référence. Aujourd’hui, 95 % des brevets liés aux grandes cultures appartiennent à des membres de l’ACLP. « Les sélectionneurs peuvent donc y accéder dans ces conditions favorables », précise la responsable de la plateforme. Pour les semences potagères, l’International Licensing Platform propose un système similaire.
Transparence et équité entre acteurs
Enfin, chaque membre déclare ses variétés commerciales contenant un gène breveté, ce qui limite les risques de monopole. Les entreprises extérieures à la plateforme peuvent refuser de licencier un trait, mais elles perdent alors la garantie d’obtenir d’autres licences. « Ce modèle renforce la transparence et la concurrence loyale entre semenciers », souligne la directrice.
Désormais, le conseil d’administration de l’ACLP travaille à l’élargissement aux espèces ornementales et forestières. Il œuvre également à la création d’une marketplace pour les brevets non encore exploités.
Hélène Guillot, est directrice de l’ACLP. Auparavant, cette juriste a travaillé pour l’Union française des semenciers puis à la Fédération internationale des semences sur les questions de propriété intellectuelle.