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Pomme de terre

Les pucerons de la pomme de terre

Représentant en eux-mêmes un impact rendement faible, les pucerons de la pomme de terre transmettent en revanche des virus, au risque important. Ceux-ci peuvent affecter de manière significative les rendements.

Face à ces ravageurs, la mise en œuvre d’une stratégie intégrée de surveillance et de lutte est indispensable.

Il existe trois principaux pucerons nuisibles pour la culture de la pomme de terre :

  • Le Myzus persicae (puceron vert du pêcher),
  • Le Macrosiphum euphorbiae (puceron vert de la pomme de terre),
  • Aphis nasturtii, parfois appelé « puceron du cresson ».

Ces pucerons véhiculent différents types de virus : virus Y de la pomme de terre (PVY, Potato virus Y), virus de l’enroulement (PLRV, Potato leafroll virus) et virus A de la pomme de terre (PVA).

La lutte contre ces bioagresseurs vise donc principalement à limiter la propagation virale, notamment dans les parcelles de production de plants.

Les cycles biologiques des pucerons de la pomme de terre

Le Myzus persicae (puceron vert du pêcher) réalise une partie de son cycle de vie sur des arbres fruitiers comme le pêcher (hôte primaire). Mais cette espèce est en réalité très polyphage et colonise de nombreuses cultures, dont la pomme de terre. Ce puceron est l’un des principaux vecteurs de virus, notamment du PVY et du PLRV.

Myzus persicae a un cycle de développement rapide en conditions douces, avec plusieurs générations possibles par an. En climat tempéré, il hiverne souvent sous forme d’œufs sur les hôtes primaires (arbres fruitiers). Par la suite, au printemps, Il migre vers des hôtes secondaires comme la pomme de terre.

Le Macrosiphum euphorbiae (puceron vert de la pomme de terre) est une espèce spécifique de la pomme de terre. Il est capable de transmettre des virus comme le PVY. Cependant, sa capacité de vol étant plus limitée, il a une dynamique épidémique moindre que Myzus persicae.

Macrosiphum euphorbiae colonise activement les parties aériennes de la plante, notamment le feuillage, les pétioles et les tiges. Il privilégie des conditions fraîches à tempérées peut se développer très rapidement en début ou fin de saison.

©IStock

Une colonie de pucerons verts de la pomme de terre – Macrosiphum euphorbiae

Enfin, Aphis nasturtii, parfois appelé « puceron du cresson », est une espèce moins connue.  Mais il est présent dans les parcelles de pomme de terre, dans le Nord de la France.

Ce puceron joue pourtant un rôle non négligeable dans la transmission de virus, en particulier du PVY. Comme les autres espèces, la transmission de virus peut se faire de façon non persistante, c’est-à-dire sans installation durable sur la plante, contrairement à la transmission persistante ou semi-persistante, qui nécessite une piqûre longue allant de 30 minutes à 48 heures.

Aphis nasturtii est bien adapté aux zones fraîches et humides. Il peut coloniser la pomme de terre en formant des colonies compactes à la face inférieure des feuilles. Sa croissance est cependant lente comparée aux autres espèces. Sa présence peut également être sous-estimée car peu visible à l’œil nu.

La nuisibilité des pucerons de la pomme de terre

Les dégâts causés par les pucerons de la pomme de terre sont de deux ordres :

  • Dégâts directs : les piqûres d’alimentation affaiblissent les plantes, provoquent des déformations foliaires et peuvent réduire la photosynthèse. À forte densité, une fumagine peut apparaître, favorisée par le miellat excrété par les pucerons.
  • Dégâts indirects : la véritable menace que représentent ces ravageurs réside dans leur capacité à transmettre des virus, notamment le PVY et PLRV. Ces infections virales peuvent entraîner des pertes de rendement allant jusqu’à 80 % sur certaines variétés sensibles.

Le seuil de nuisibilité est très bas dès lors que la parcelle contient des plants vecteurs ou sensibles. Une seule piqûre peut suffire à transmettre un virus de manière irréversible.

Plus spécifiquement :

L’extrême mobilité du puceron vert du pêcher combinée à une reproduction rapide en fait un vecteur viral de premier plan. Même lorsqu’il ne reste que brièvement sur la culture, il peut transmettre efficacement les virus non persistants.

La nuisibilité du puceron vert de la pomme de terre est directe (affaiblissement, stress hydrique) et indirecte (transmission de virus). Son impact peut devenir significatif si les populations ne sont pas contrôlées. Il induit notamment des enroulements foliaires, un ralentissement de la croissance et une dégradation de l’état sanitaire général des plants.

Enfin, le puceron du cresson est particulièrement redouté pour sa capacité à maintenir et transmettre le PVY tout au long du cycle cultural. Il agit comme réservoir secondaire, surtout en l’absence de fortes pressions d’autres pucerons. Sa détection précoce est donc un enjeu important en production de plants.

Situations à risque

Les parcelles composées de plants non certifiés, ou situées à proximité de jachères fleuries ou de cultures hôtes, sont plus vulnérables. De même, Les printemps précoces et doux favorisent les premières pullulations.

Certaines variétés de pomme de terre sont également plus attractives pour Macrosiphum euphorbiae. L’absence de traitement insecticide en début de cycle ou des conditions trop sèches sans prédateurs naturels peuvent enfin aggraver la situation.

Stratégie de protection combinatoire contre les pucerons de la pomme de terre

Face à des pucerons aux comportements variés, la lutte repose sur une stratégie intégrée (IPM), combinant plusieurs leviers complémentaires :

Surveillance et anticipation : selon Arvalis, la protection des pommes de terre commence dès la levée

  • Mise en place de pièges jaunes pour suivre les vols précoces.
  • Utilisation des bulletins de santé du végétal (BSV) ou de réseaux pour ajuster les interventions.
  • Observation visuelle des colonies sur les feuilles, notamment pour Macrosiphum euphorbiae et Aphis nasturtii.
Moyens prophylactiques
  • Destruction des repousses (issues de tubercules restés en terre) servant de réservoir viral et de support à l’installation précoce des pucerons.
  • Distance suffisante avec les cultures sensibles pouvant servir de relais viraux (tabac, betterave, etc.).
  • Nettoyage rigoureux des matériels et limitation de la transmission mécanique dans les stations de plants.
Choix variétal et qualité des plants
  • Utilisation de plants certifiés exempts de virus.
  • Choix de cultivars tolérants ou résistants au PVY, lorsque disponibles.
Usage raisonné des méthodes chimiques
  • En culture de plants, application d’insecticides systémiques ou de pulvérisations ciblées en début de cycle.
  • Respect des seuils d’intervention et du calendrier de sensibilité virale.
  • Attention aux phénomènes de résistance (notamment pour Myzus persicae), d’où l’intérêt de diversifier les modes d’action.
Leviers agroécologiques en développement
  • Enherbement temporaire des bandes périphériques pour piéger les pucerons volants ou favoriser les auxiliaires (coccinelles, syrphes).
  • Utilisation de plantes pièges ou répulsives dans les zones tampon.
Les solutions de biocontrôle contre les pucerons de la pomme de terre

Au cours des dix prochaines années, la lutte contre les pucerons de la pomme de terre devrait évoluer vers des stratégies plus ciblées.

Les solutions de biocontrôle basées sur des micro-organismes font l’objet d’un développement actif : bactéries, champignons entomopathogènes ou endophytes.

Sont aussi explorées les solutions conjuguant plantes de service et techniques de cultures associées. Ces solutions modifient les interactions insectes-plantes en faveur des auxiliaires.

La rupture des symbioses entre pucerons et fourmis est également explorée comme levier indirect pour renforcer l’efficacité des ennemis naturels.

Parallèlement, les outils d’agronomie digitale prennent une place croissante. Ceux-ci permettent de détecter les foyers de pucerons en temps réel. De même, les modèles prédictifs intègrent désormais des données spatiales et environnementales pour guider des interventions localisées.

Enfin, les analyses génétiques à haut débit (notamment du contenu stomacal des pucerons) permettent d’identifier les sources virales cachées dans le paysage. Il devrait ainsi être possible de concevoir des stratégies paysagères de prévention.