Journées Cietap 2025 : des résultats concrets pour une pulvérisation plus précise

La venue d’Éric Légeois aux journées de la Commission interprofessionnelle d’étude des techniques d’application de produits phytosanitaires (Cietap) les 12 et 13 mars sur le site d’Inrae à Montpellier, n’est pas anodine. Ce haut responsable des politiques à la Direction générale de la santé de la Commission européenne porte un message clair. Les agroéquipements doivent jouer un rôle croissant dans la réduction des risques liés aux produits phytopharmaceutiques. En effet, les innovations technologiques présentées visent un double objectif : réduire l’exposition aux produits phytopharmaceutiques tout en maintenant l’efficacité des traitements.

D’ores et déjà, un document-guide publié en mai 2024 par la Commission européenne en pose les bases. Il recense les mesures d’atténuation des risques à mobiliser lors des traitements phytopharmaceutiques.

Outre les équipements de protection individuelle ou les systèmes de transfert fermé, le texte met en avant les outils d’agriculture de précision. Par exemple, il cite les buses antidérive, les dispositifs de pulvérisation avec modulation de la dose ou encore les systèmes de reconnaissance des adventices.

Une agriculture de précision bientôt intégrée aux homologations ?

« En raison du progrès technologique, intégrer l’agriculture de précision aux futures homologations aurait du sens », souligne Julien Durand-Réville, responsable agronomie digitale et prévention des risques chez Phyteis. D’ailleurs, les parties prenantes impliquées dans l’agriculture de précision partagent leurs données scientifiques dans le cadre de la Task Force EUPAF (European Precision Application Task Force). Celle-ci est hébergée par le BVL (Office fédéral de la protection des consommateurs et de la sécurité alimentaire) allemand. Elles visent surtout l’échange sur les technologies réduisant l’exposition, afin de les intégrer au cadre réglementaire européen.

Partager les données réglementaires sur les produits phytopharmaceutiques.</h5>

Le projet AgriGuide de CropLife Europe, aussi au programme des journées Cietap 2025, s’inscrit dans cette logique de partage et de sécurité pour traiter les cultures. Il organise les données réglementaires sur les produits phytopharmaceutiques dans une base de données européenne. « Son objectif est de rendre ces informations accessibles, homogènes, interopérables et lisibles par les machines », explique Julien Durand-Réville. Les données intègreront directement les protocoles de pulvérisation automatisés. Lesquels constituent l’une des évolutions technologiques de la pulvérisation.

Enfin, ces informations seront également disponibles pour les développeurs de logiciels. Actuellement en test, la plateforme AgriGuide sera déployée en 2026.

Cas concrets de matériel de pulvérisation pour réduire l’exposition et améliorer l’efficacité

À titre d’exemple, un prototype de pulvérisateur de précision pour la vigne répond à tous ces enjeux de baisse des quantités de produits tout en obtenant une meilleure efficacité. Conçu par l’Institut Français de la Vigne et du Vin (IFV), Inrae, Optima Concept et Berthoud, il émane du programme ABA PIC (Accélération du biocontrôle et des agroéquipements).

La particularité de cette machine ? Un ajustement de la dose de produit pour chaque buse et selon la biomasse de la vigne. Cette modulation fine de la pulvérisation provient de la technologie PWM (Pulse With Modulation). De plus, grâce au réseau GNSS RTK, l’engin suit un plan automatisé de pulvérisation avec une précision centimétrique.

La reconnaissance des adventices progresse aussi

Une alternative ? Adapter les pulvérisateurs existants. Arvalis, avec Carbon Bee, teste cette option sur ses Digifermes.

Par ailleurs, un essai mené en 2023 par Bayer avec le système Sniper de Berthoud basé sur l’IA affiche 72 % d’économie d’herbicides sur maïs et 97 % d’efficacité. Enfin, une méthode mobilisant des drones est en expérimentation en Espagne dans le cadre d’une autorisation gouvernementale. Elle se concentre sur le traitement herbicide ciblé des daturas dans les maïs.

Formation des agriculteurs et choix des pulvérisateurs facilités

Au-delà des avancées technologiques, la formation des agriculteurs s’impose comme un levier stratégique pour améliorer la protection des cultures. C’est l’objectif de projets comme Néopulvé, mené par l’Inrae Montpellier ou de la plateforme Mon Réglage Pulvé, pensée pour les viticulteurs.

En outre, le secteur de la vigne fait figure de précurseur. Avec le label Performance Pulvé, il identifie les matériels capables de réduire les doses jusqu’à 50 %. Le bilan est concluant au bout de quatre années de fonctionnement. En effet, 37 modèles sous l’impulsion de 18 fabricants sont référencés avec des notes de 1 à 7. La note 1 distingue les équipements les plus économes en produits sans perte d’efficacité. Mieux encore, trois régions — Occitanie, Grand Est et Pays de la Loire — ainsi que FranceAgriMer utilisent ce label pour attribuer les aides au renouvellement des pulvérisateurs.

La méthode du label Performance Pulvé fait mouche puisqu’elle est en cours d’élaboration pour ceux adaptés à l’arboriculture.

« Ce que nous voyons aujourd’hui à la Cietap préfigure les standards de demain en matière de pulvérisation de précision. La combinaison entre modulation de dose, précision d’application et maîtrise de la dérive constitue sans nul doute le meilleur levier pour réduire les quantités de produit tout en maintenant l’efficacité », conclut Ronan Vigouroux, responsable environnement chez Phyteis.